L’un des plus grands défis de l’enseignement au XXIe siècle est de rester pertinent alors que le monde change de plus en plus vite. Qu’il soit technologique, politique, environnemental ou entrepreneurial, le contexte dans lequel les étudiants évolueront affecte non seulement les objets d’apprentissage, mais aussi la façon dont l’apprenant s’approprie l’apprentissage, d’où l’importance d’un enseignement du sens, en prise avec la vraie vie.
En entrepreneuriat éducatif, la considération du facteur «contextuel» est encore plus crucial, car il change l’identité même de l’entrepreneur. Deux questions se posent, par conséquent. Quelles sont les nouvelles réalités qui définissent les entreprises et l’identité des entrepreneurs? Comment ces changements affectent-ils le contenu et la manière d’enseigner l’entrepreneuriat?
Dans sa conférence « Identités entrepreneuriales » livrée lors de l’Événement ÉducationEntrepreneuriat 3e édition organisé par le PEEC, Patrice Chessé a présenté un exemple concret de la manière dont l’automatisation affecte l’emploi et les nouvelles mentalités qui façonnent l’identité de l’entrepreneur du XXIe siècle.
UN MONDE DYNAMIQUE
Depuis le début des années 1900, on assiste à une forte évolution dans le domaine technologique. Les différentes vagues d’innovation observées ont un dénominateur commun: l’idée d’accroître la rapidité d’exécution des tâches au sein d’une entreprise ou d’une industrie. C’est le règne de l’automatisation qui continue d’avoir un impact non négligeable sur la qualité des produits et des services, la vitesse d’exécution des processus d’affaires et l’efficacité en général. Parallèlement à cela, les coûts baissent considérablement, permettant aux entreprises d’accroître leurs marges.
Une comparaison de la topographie de l’emploi aux États-Unis en 1978 et en 2014 nous laisse perplexe quant à l’avenir des emplois. En effet, en 1978, le marché de l’emploi était partagé entre les secrétaires, les fermiers et les opérateurs de machine. 36 ans plus tard, en 2014, la configuration a complètement changé pour laisser place aux camionneurs. La raison en est simple, mais pas si évidente. La présence des géants du commerce électronique, tels Amazon, Shopify, E-Bay et de nombreuses boutiques en ligne, a occasionné des opportunités de développement des services de livraison de colis, d’où l’explosion du nombre de camionneurs sur les routes. Ce qu’il convient de retenir, c’est que le marché de l’emploi évolue au rythme des changements technologiques, en ayant des répercussions majeures sur des domaines autres que ceux associés aux technologies.
DE NOUVELLES MENTALITÉS?
Le système de valeurs en entrepreneuriat a également connu certains changements.
- La culture du profit a laissé place au sens. La tendance que l’on observe aujourd’hui est une propension à la recherche de sens plutôt qu’à l’augmentation du chiffre d’affaires à tout prix. L’intention de l’acte entrepreneurial est encore plus marquée de nos jours, avec un souci d’améliorer les impacts sociaux et de réduire les externalités négatives des activités entrepreneuriales.
- Des réseaux de collaboration au lieu d’une structure de gestion hiérarchique. Le paradigme de la démocratie et de l’égalité se reflète dans les structures de gestion des entreprises. Ici, au Québec, on assiste à un accroissement des coopératives prônant un mode de gestion plus sain et plus égalitaire
- Responsabiliser plutôt que contrôler. Le leadership entrepreneurial se matérialise au quotidien par la délégation de pouvoir. Donner plus de latitude peut rendre plus créatif et par conséquent, plus performant.
- Expérimenter vaut mieux que planifier! Cela nous fait penser au Business Model Canva qui tend à remplacer le plan d’affaires aux étapes qui précèdent le démarrage jusqu’à l’obtention d’un prêt. Autrement dit, tester un modèle d’affaires sur le terrain renseigne plus sur la rentabilité et la viabilité d’un projet qu’une planification méticuleuse, qui risque d’être rapidement remise en quesiton!
- Cultiver la transparence au lieu du secret. De la publication des rapports financiers à la traçabilité d’un produit, en passant par le partage de bonnes pratiques par des experts de classe mondiale, la transparence est une valeur sûre pour améliorer la confiance.
L’URGENCE DE S’OUVRIR ET DE RESTER OUVERT
Qu’est-ce que cela suggère pour l’entrepreneuriat éducatif?
- Les intervenants entrepreneuriaux des collèges doivent s’informer et rester proactifs afin d’aider les étudiants à mieux anticiper les transformations des entreprises et des emplois. Cette réaction aidera certains à mieux anticiper la nature des entreprises du futur, tandis qu’elle permettra à d’autres de demeurer flexibles pour accueillir les emplois émergents et se réinventer si l’occasion se présente.
- L’automatisation change même le concept de commerce en ligne. Les Automated Income Business permettent de créer une entreprise en ligne sans inventaire, sans compétences techniques particulières et propulsé par des algorithmes qui assurent la gestion (automatique) des transactions. Soutenir les jeunes entrepreneurs d’aujourd’hui suggère aussi la connaissance de ces grandes tendances.
- Pour accompagner efficacement les jeunes entrepreneurs, il faut aussi connaître et comprendre les nouveaux paradigmes de l’entrepreneuriat. En effet, ces nouveaux modes de pensée affectent non seulement la manière dont les jeunes créent et gèrent des entreprises, mais surtout leur identité en tant qu’entrepreneur, leurs valeurs profondes et leur pourquoi.Revolution
Le sujet est difficile et malheureusement, le conférencier a manqué de temps pour aborder plus en profondeur un autre aspect essentiel. Il nous écrit: « Se connaitre pour aller au bout de l’entrepreneuriat devient vital, dans un monde où les règles du jeu changent constamment et qui devient de plus en plus complexe. Il faut connaître ses ressources pour appréhender de nouvelles grilles de lecture de notre environnement. »
Ce n’est que partie remise!
À propos du conférencier
Diplômé d’une maîtrise en finances et entrepreneuriat, Patrice Chessé est un entrepreneur passionné. Il a également passé plus de 15 ans au contact de créateurs d’entreprise, à les accompagner et à les aider à trouver les ressources nécessaires au démarrage ou à la croissance de leur projet. Il est enseignant, formateur et mentor en créativité, entrepreneuriat et innovation auprès de HEC Montréal, des universités Concordia et Sherbrooke, ainsi que du Collège militaire Royal à Kingston, de Futurpreneur et de différents Carrefours Jeunesse emploi (CJE) à Montréal.
