Un reportage de Melissa Claudie Philippe
L’entrepreneuriat féminin est de plus en plus présent dans les débats entrepreneuriaux. En effet, parler de relève entrepreneuriale c’est aussi envisager l’entrepreneuriat de manière inclusive en tenant compte des particularités de la population québécoise. D’ailleurs, l’idée d’inclusion donne tout son sens à la manière dont on envisage la sensibilisation, la promotion et le développement de l’entrepreneuriat. En effet, les femmes et les hommes ont une vision différente de l’entrepreneuriat parce qu’ils l’abordent de points de vue différents.
Au cours de l’Événement éducation / entrepreneuriat, 2e édition, deux personnes de renommée ont été invitées à présenter des faits relativement à l’entrepreneuriat féminin au Québec et des moyens de le promouvoir au sein des collèges, dans une perspective de développement de l’entrepreneuriat éducatif. Ces deux conférences ont été suivies d’un panel sur le même sujet.
M. Étienne St-Jean est un éminent professeur et chercheur en entrepreneuriat à l’Institut de recherche sur les PME de l’Université du Québec à Trois-Rivières (INRPME de l’UQTR). Il a commencé son intervention par une présentation des trouvailles de la dernière étude du Global Entrepreneurship Monitor (données de 2017). Cette étude est réalisée annuellement auprès d’un échantillon de plus de 200 000 personnes et jusqu’à 100 pays y ont participé. Pour l’année 2017, elle révèle notamment que :
- Les femmes estiment avoir moins les compétences requises pour se lancer en affaires que leurs homologues masculins.
- Les femmes voient moins d’opportunités de démarrage que leurs homologues masculins.
Le chercheur suggère que cela pourrait être dû notamment au fait que les femmes s’orientent vers les professions liées avec les soins, des secteurs qui offrent moins l’opportunité de développer leurs compétences entrepreneuriales ou d’identifier des opportunités. Deux données qui ont vivement fait réagir les participants qui ont soulevé des questionnements sur le rôle des hommes dans la réussite des femmes en entrepreneuriat, les stéréotypes de genres et la perspective des femmes de la notion d’entrepreneuriat. Le chercheur a fait remarquer que les entreprises lancées par des femmes étaient plus sujettes à durer et à réussir: les femmes se lancent prudemment mais solidement.
Pour compléter la présentation de M. St-Jean, Madame Nadine Pirotte a partagé quelques moyens de promouvoir l’entrepreneuriat féminin dans le contexte collégial. Mme Pirotte est la Directrice générale de la Compagnie F, premier organisme montréalais dédié à l’entrepreneuriat féminin. Ses conseils ne pouvaient pas être plus pertinents pour l’entrepreneuriat éducatif, comme le confirment les panélistes, un peu plus tard durant l’événement.
Selon les informations partagées par Mme Pirotte:
- Les femmes se sentent moins interpellées par les valeurs qu’incarnent la plupart des hommes entrepreneurs.
- Les femmes perçoivent l’entrepreneuriat et la réussite entrepreneuriale différemment des hommes.
- Les femmes en entrepreneuriat sont évaluées à la lumière de critères biaisées en raison de stéréotypes de genres favorables aux hommes.
Les collèges ont certainement un rôle à jouer afin de renverser certains mythes et encourager l’entrepreneuriat auprès des jeunes femmes. En ce qui a trait au rôle des collèges, Mme Pirotte préconise d’amener une transformation radicale dans la perception des jeunes femmes envers l’entrepreneuriat, en développant leur confiance en soi et leurs compétences, suivant des approches susceptibles de les valoriser.
Sous une note divertissante, le panel animé par Melissa Philippe, chargée de projet du PEEC, a permis à 3 intervenants collégiaux de se prononcer sur les présentations qui ont précédées et de positionner leurs collèges face aux enjeux soulevés.
Tous les panélistes dont Mme Josée Gaudreault (enseignante et co-responsable de la coordination du département et programme au Collège Rosemont et répondante PEEC), Anne-Solène Rioult (fondatrice de la compagnie Les FACILitatrices et chargée de cours dans un AEC en création d’entreprises créatives au Cégep du Vieux Montréal) et Philippe Petit (enseignant en Techniques de comptabilité et de gestion au Cégep de Sorel-Tracy) s’entendent sur le fait que les collégiennes se sentent moins compétentes pour entreprendre que les garçons. Ils ont également remarqué que la culture est un facteur important dans le choix des jeunes femmes à ne pas opter pour une carrière en entrepreneuriat.
Et puisque éduquer les jeunes c’est aussi contribuer à leur épanouissement, le système éducatif doit agir dans le sens de l’instauration de valeurs qui contribuent à l’accomplissement de tous. En cherchant à offrir aux jeunes femmes des opportunités et des services adaptés à leur contexte, le système éducatif sera plus à même faciliter le développement de leurs compétences entrepreneuriales. Les panélistes se sont tous prononcé en faveur d’initiatives dans leurs collèges visant spécifiquement les femmes.