Il y a une cinquantaine de communautés entrepreneuriales au Québec, mais la première et la plus importante est à Shawinigan. Née de la concertation de tous les acteurs du milieu, en raison d’une crise économique régionale majeure, soutenue depuis près de 10 ans par un maire déterminé, Michel Anger, la Communauté entrepreneuriale Shawinigan est devenu un modèle tant par ses fruits que par le soutien qu’elle reçoit de la population.
Les auteurs: Rina Marchand, Nathaly Riverin et Denis Morin
Dans leur petit ouvrage «Des communautés plus entrepreneuriales : Se prendre en main», Rina Marchand, Nathaly Riverin et Denis Morin décrivent les conditions de leur succès: notamment la concertation, des cibles communes claires et peu nombreuses, la mesure périodique des résultats, un plan d’action précis, un leadership partagé, l’implication de toute la communauté. On voit d’emblée l’importance du réseau éducatif, en particulier en ce qui concerne le développement et la consolidation d’une culture entrepreneuriale.
Le maire de Shawinigan, Michel Anger.
Modeste, le maire de Shawinigan, soutient que pour avancer il faut «faire ensemble», bien que de l’avis de tous les intervenants son leadership ait été déterminant.
Lors du lancement de cet ouvrage, le 18 septembre dernier, citant celui qu’on qualifie de «père de l’entrepreneuriat au Québec», Paul-Arthur Fortin, Nathaly Riverin qualifie une communauté entrepreneuriale de «jardin d’espoir et de développement», car elle repose sur une transformation culturelle globale. Il s’agit de changer les mentalités, notamment par l’éducation, et ce dès la maternelle. Les travailleurs eux-mêmes sont appelés à devenir des intrapreneurs.
La concertation des acteurs régionaux ne peuvent se passer de la mesure: d’où l’indice entrepreneurial qui permet d’observer la situation de départ et de mesurer périodiquement les progrès.
Vif d’esprit, Paul-Arthur Fortin discute avec sa conjointe et deux des auteurs à la suite de la conférence de presse du 18 septembre 2018 à Shawinigan.
Les auteurs ont insisté à plusieurs reprises sur l’importance de la mesure. En effet, comment peut-on s’améliorer si on ne sait pas d’où l’on part et si on se fie seulement à ses impressions? C’est important de connaitre l’état de la situation initiale et de mesurer les progrès suivant divers paramètres. Non seulement cette connaissance exacte permet-elle de se situer, mais elle permet aussi de construire nos actions autour des caractéristiques spécifiques de la communauté.
Nathaly Riverin de Rouge Canari
Un autre ingrédient du succès est la concertation de tous les acteurs de la communauté et la persévérance, car les résultats peuvent prendre des années. Il faut d’abord changer ou faire évoluer la culture, mais ensuite transformer les mentalités et instaurer de nouveaux comportements et réflexes. En favorisant les prises de conscience, on encourage l’innovation et le développement d’initiatives grâce auxquelles les gens tentent de prendre en mai leur propre avenir.
Rina Marchand de la Fondation de l’entrepreneurship
En outre, les autorités doivent s’impliquer financièrement: la ville, les établissements, les gouvernements. Le financement pour animer une communauté entrepreneuriale doit être là et surtout persistant pendant plusieurs décennies!
Ultimement la constitution d’une communauté entrepreneuriale permet de créer de la richesse nouvelle pour la région: des emplois, des entreprises, de l’innovation sociale, technologique ou culturelle. Si certaines de ces entreprises nouvelles croissent et se développent, en fin de compte elles exporteront et ramèneront une nouvelle source d’enrichissement dont la population bénéficiera de diverses manières.
Denis Morin jusqu’à récemment directeur de la Communauté entrepreneuriale de Shawinigan
De fait, une communauté entrepreneuriale est ancrée dans un écosystème où chaque acteur a un rôle à jouer. Organisée autour d’un plan d’actions comportant des cibles et des actions structurantes, elle implique aussi bien le secteur de l’éducation que les entreprises, les employeurs publics, les municipalités, les organismes intervenant tant dans les secteurs économiques que culturels et communautaires. La communauté compose une grande chaîne où chaque maillon a son importance, aussi modeste paraît-il.
Venons-en au rôle particulier des collèges dans ce dispositif. Prenons l’exemple de Shawinigan. Dès les débuts (2009-2013) le Collège s’engageait à former ses enseignants avec des outils sur l’esprit d’entreprendre, de transposer les valeurs entrepreneuriales en formation technique et de créer des clubs entrepreneurs étudiants. Lors du plan actuel (2018-2021) il s’engage notamment à participer activement au Projet d’éducation entrepreneuriale au collège (PEEC), à fonder une entreprise école et à implanter un magasin «en lien avec le développement durable et les produits équitables au Collège.»
En 2017, on pouvait lire que «Le Collège Shawinigan est membre des Communautés entrepreneuriales de Shawinigan et de Mékinac. Il souhaite jouer un rôle déterminant dans le développement de la région en matière d’entrepreneuriat.»
À l’avant, de gauche à droite : Sydney Déziel, Élie Prud’Homme, Élyse Rouette, membres du Club entrepreneur; Lucie Hamel, directrice adjointe des études, Programmes et réussite; Michael Perreault, membre du Club entrepreneur. À l’arrière : Gilles Lamy, président du comité Vision entrepreneuriat Desjardins; Louis Deslandes, membre du Club entrepreneur; Guy Dumais, directeur général [aujourd’hui à Bois-de-Boulogne]; Catherine Côté-Denis, conseillère pédagogique à l’entrepreneuriat; Jade Thellend, présidente du Club entrepreneur et Éric Milette, directeur des études [aujourd’hui directeur général].
Par cet exemple du Collège de Shawinigan, on voit que l’ordre collégial peut s’impliquer dans ce développement comme un acteur à part entière et y jouer un rôle positif et dynamique, tout en affirmant ses valeurs propres.
Le PEEC encourage les collèges à poursuivre leur implication dans leurs communautés entrepreneuriales respectives. En effet, l’isolement ne permettrait pas aux collèges de stimuler l’entrepreneuriat dans leur région, ni même d’atteindre leurs objectifs éducatifs propres. Cette implication est porteuse de nombreux partenariats comme on en observe un peut partout: à Laval, à Québec, à Sorel-Tracy, pour n’en nommer que quelques-uns.
Les personnes qui apprennent mieux dans l’action bénéficient grandement de ces partenariats et du concret que des projets conjoints génèrent. Nous y reviendrons dans une prochaine chronique.
Références
- Centre d’entrepreneuriat Alphonse Desjardins Shawinigan Coopérative de solidarité: http://www.ceads.ca/
- Communauté entrepreneuriale de Shawinigan: http://www.ceshawinigan.ca/. Le guide y sera disponible sous peu au format PDF.
- Rouge Canari: https://rougecanari.com/
- La Fondation de l’entrepreneurship, Réseau M: https://www.reseaum.com/reseau-m