Ces dernières années, de nombreuses actions sont entreprises pour dynamiser l’entrepreneuriat au Québec. En effet, vitalité économique et création d’entreprises florissantes et pérennes vont de pair. D’un point de vue micro, chaque entreprise doit trouver sa place dans son environnement et être « le producteur de la solution efficace et accessible » en réponse à un problème auquel plusieurs personnes font face. Ce public cible, jadis identifié comme le marché ou les clients, n’est plus perçu de la même manière aujourd’hui, selon l’auteur de La fabrique de l’entrepreneuriat, Christophe Schmitt. Il s’agit plutôt de l’écosystème personnel de l’entrepreneur.
Quelques définitions
Pour bien comprendre le point de vue de l’auteur, il convient d’expliquer les termes suivants :
- Situation entrepreneuriale : l’articulation entre l’entrepreneur, son intentionnalité, le projet entrepreneurial et sa communication auprès des acteurs de l’écosystème.
- Intentionnalité : le futur souhaité par l’entrepreneur, le résultats de ses interactions avec l’écosystème, autrement dit : son projet entrepreneurial.
- Agir entrepreneurial : l’expérience que se fait l’entrepreneur en interagissant avec son écosystème.
« Écosystème » et « Écosystème favorable », quelle différence?
- Pour la première fois utilisée par le botaniste Arthur George Tansley en 1935, cité par Odile Uzan (2013) un écosystème est d’abord en « un système d’interactions entre les populations de différentes espèces vivant dans un même site, et entre ces populations et le milieu physique ». L’auteure poursuit en citant James Moore (1996) s’inspire de ce concept pour proposer une définition adaptée au monde des affaires qu’il définit comme « une communauté économique supportée par l’interaction entre des entreprises et des individus — les organismes du monde des affaires. Cette communauté économique va produire des biens et des services en apportant de la valeur aux clients qui feront eux-mêmes partie de cet écosystème. »
- Pour Christophe Schmitt (2018), l’écosystème favorable de l’entrepreneur, contrairement à l’écosystème qui est une donnée qui s’impose, est construit et entretenu par l’entrepreneur lui-même. L’auteur précise : « Nous insistons tout particulièrement sur cette dimension de construction, car c’est essentiellement l’entrepreneur lui-même qui va définir les acteurs avec qui il va être en contact et qui vont faire partie de son écosystème.
Un défi pour l’entrepreneur
L’environnement de l’entrepreneur offre un espace où l’interaction avec des entités essentielles à la réussite d’un projet d’affaires est possible. C’est seulement lorsque ces interactions ont lieu que l’écosystème peut devenir favorable au démarrage, à la croissance et à la pérennisation des affaires.
Le véritable défi de l’entrepreneur se situe à ce niveau. Si l’entrepreneur ne peut rien changer à son environnement, il peut néanmoins agir intelligemment et stratégiquement afin que les composantes de cet environnement servent son activité entrepreneuriale.
- Construire son réseau et participer à des activités entrepreneuriales : l’entrepreneur doit créer des moments d’échanges entre lui et les acteurs autour de son projet. Ces situations, pour être fructueuses, doivent permettre aux différents intervenants d’harmoniser leurs projections et leurs représentations du monde en vue de déployer le projet d’affaires. L’entrepreneur, de son côté, doit traduire son intentionnalité auprès des autres acteurs de l’écosystème.
- Construire du sens : toute situation qui s’offre à l’entrepreneur est ouverte à une interprétation porteuse de sens. Voilà pourquoi l’auteur poursuit en affirmant qu’il n’y a pas de solution prédéterminée face aux différentes problématiques. L’entrepreneur les façonne, mais encore, il doit relier l’expérience et le contexte présent à son intentionnalité, en gardant les yeux sur le futur souhaité.
- Faire un travail de représentation humaine en vue de développer des relations : évidemment, autour de l’entrepreneur gravitent des personnes ayant des finalités différentes. Son projet l’amène à communiquer et à interagir avec différents intervenants afin de faire évoluer son projet selon ses objectifs. Les efforts de communication sous-jacents ne lui donnent pas le choix que d’améliorer constamment son rapport à son monde.
Le but recherché
L’objectif de l’entrepreneur est de communiquer son intentionnalité de telle sorte qu’une relation “fructueuse” se développe avec les différents acteurs de l’écosystème, d’où l’émergence d’un écosystème favorable constitué de personnes adhérant au projet entrepreneurial. C’est vers cela que tend un entrepreneur qui s’engage dans le processus entrepreneurial. Voilà tout l’enjeu de l’agir entrepreneurial.
Parfois, l’entrepreneur doit faire face à un rejet définitif de son projet. Même s’il n’abandonne pas dans les premiers instants, des signaux assez clairs peuvent l’y emmener. Or, ne nous méprenons pas, l’adhésion tant convoitée ne se fait pas toujours dès les premières rencontres ou échanges. La majorité des entrepreneurs sont amenés à évoluer, tout en faisant évoluer leur projet au fil des expériences tissant ainsi des liens positifs avec leur écosystème, jusqu’à ce que ce dernier devienne favorable.
Références
- SCHMITT C. (2018), “La fabrique de l’entrepreneuriat”, Éditions Dunod, France
- MOORE J.-F. (1996), “The Death of Compétition. Leadership and Strategy in the Age of Business Ecosystems”, Harper Business, New York.
- TANSLEY A.-G. (1935), “The use and abuse of vegetational concepts and terms”, Ecology, Vol.16, N° 3, p. 284-307.
- Uzan O. (2013). “Stratégies écosystémiques et modalités de coordination partenariale et territoriale. Le cas Danone”, repéré à https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2013-1-page-194.htm